Souterrain

 

Il est des trains qui ne s’arrêtent pas. Qui oublient de s’arrêter en gare. C’est déjà arrivé. Pour beaucoup, le train s’arrête. Tu montes et hop ça avance. Tu vas quelque part, tu  empruntes les chemins normaux ou les chemins de traverse mais tu y vas.

Parfois en route, tu t’égares ou alors tu trouves ce sel à la vie qui fait que vous voyagez en carré d’as, plein aux as et comme des rois, des reines. Puis il y a des princes et des princesses qui attendent leur heure. Longtemps, enfermés dans un amour sans horaires, un amour  trop pur, trop vain ou sans destin. Comme des heures à attendre un train qui de toute façons ne s’arrêtera pas en gare. Ou juste quelques minutes, le temps de te prendre rapidement et de te rejeter une ou deux gares plus loin, parfois trois. Trop rapide pour imaginer quoi que ce soit. Pour combler l’angoisse de la prochaine étape.

Des TGV complets passeront sans avoir prévu de faire escale. Les fauteuils duos seront pris, et un ou deux strapontins pourraient, éventuellement, te faire de la place. Les voyageurs te font signe de la main, les oreilles masquées sous leurs casques d’I-Pod. De toutes façons, on a dit que le train ne s’arrêtait pas. Alors tu passes ton chemin et prends le métro. Tu rames pour t’accrocher à la barre, quelques instants. Avant de descendre. Fouler le sol gris du quai, tacheté d’asphalte. Marcher parmi eux, la tête haute et les yeux dans le vague horizon. Jamais vraiment arrivés, descendre encore des escaliers qui mènent à un autre tram’, un autre petit drame. Se retrouver un niveau le plus bas. Plus d’horizon, juste la chaleur artificielle de la trame, que tu attends sans impatience. Tu ne vas plus nulle part. Les voyageurs du TGV sont de lointains souvenirs, qui filent à toute vitesse vers de joyeuses villes. Défilent le long de tes pas, les images floues sur le carrelage froid des murs du souterrain. Tu ne vas nulle part, tu dérives dans les terrains gris où règnent les morts-vivants. Dans cet entre-deux, entre deux villes, entre deux gares, entre et sort, sort et entre, à la croisée des souterrains.

Novembre 2017

Une réflexion sur “Souterrain

  1. Pingback: Souterrain – Les brèves d'Agnès

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